Les vrais autistes (La suite)

J’en ai profité pour relancer sur la reconnaissance des difficultés réelles chez les adultes autistes. Je me permets de répondre aux quelques commentaires reçus sur notre page, qui ont engendrés chez moi des questionnements. J’ai donc décidé de composer cet autre texte.

L’intervention était tout à fait pertinente, ce n’était juste pas le point de mon texte. Je ne nie en rien l’existence de différents degrés de « sévérité » en autisme. Le point était simplement «  d’arrêter de dire ‘des vrais autistes’ » en contraste avec ceux qui s’en sortent un peu mieux selon l’opinion des gens. Cette formulation implique qu’en contraste aux « vrais autistes », les autres seraient donc de « faux autistes ». Ce qui n’est pas souhaitable selon moi.

Certes, il y a des degrés. Mais qu’entend-t-ton par degrés lorsque nous parlons d’autisme ? Nous parlons du niveau du besoin de soutien des personnes autistes. Les niveaux allant de 3 à 1, représentent un niveau de nécessité de soutient allant de « nécessite un soutien très important », « nécessite un soutien important » ou « nécessite un soutien », tout simplement. Ceci-dit, les niveau sont de moins en moins indiqué sur les diagnostiques, puisque ces niveaux ne fluctuent pas seulement d’un individu à l’autre, mais aussi chez un même individu tout au long de son développement. Une même personne peu évoluer ou vivre des moments qui sont beaucoup plus difficile dans certains contextes ce qui rend difficile de fixer un chiffre… Peu importe le degré de « sévérité », il est important de retenir qu’il ne faut pas minimiser la réalité vécue par chacun.

Ce type de discours revient à ignorer le diagnostic de ces personnes. Et ignorer le diagnostic d’une personne est tout aussi violent qu’un poing dans la gueule pour certains. C’est balayer du revers de la main l’existence de leur condition et leurs difficultés. Nous ne pouvons pas comparer une personne ayant un travail, un appartement, une famille avec une autre ayant une déficience intellectuelle sévère. Nous pouvons cependant prendre conscience qu’une personne autiste, aussi fonctionnelle qu’elle soit, aura elle aussi des difficultés dans de nombreuses situations de la vie quotidienne. 

C’est d’ailleurs ce que je reproche parfois aux médias. Ils ne veulent que des «scoops», donc ils vont décrire des situations vécues dans certaines parties du Québec (ou du monde) en omettant de dire que l’enfant ou l’adulte n’était pas seulement autiste, mais que bien souvent ces personnes cumulent les diagnostics. Comme la déficience intellectuelle. La situation semble terrible et on vient alors coller cette image au mot « autisme », « autiste », « asperger », etc. Pourtant il n’y aurait en fait que 15% de la population autistique qui seraient à la fois déficients intellectuels. Si les médias se souciaient un peu moins des « clicks » et un peu plus à la fidélité des détails de leurs histoires, il y aurait peut-être un peu moins de stéréotypes sur le sujet. (J’ai bien dit « un peu moins »)

Puisque nous sommes présentement le temps des fêtes, voilà un excellent contexte pour exposer mon idée. Pensez au son de la musique, des conversations et autres bruits environnants, à l’odeur des chandelles, des parfums et de la nourriture, au fait de devoir porter des vêtements pas toujours confortables, donner la bise et être touché par plein de gens qu’on ne voit qu’une fois par an, aux nouvelles saveurs et textures des aliments, ainsi que de devoir tenir des conversations qui sont très souvent contre-intuitives pour la majorité des autistes! Voici un tableau rapide de tout ce à quoi doit faire face chaque autiste à chaque rencontre familiale ou sociale. Dit comme cela ça vous semble étourdissant? Et bien ce l’est. C’est de cette façon que se sent la majorité des personnes autistes que je connais en ce temps de festivité.

(Je vous conseille de lire le texte que Valérie-Jessica Laporte nous a écrit sur un ton un peu satirique : http://royaumeasperger.com/2018/12/16/noel-autisme-cauchemardesque/

Même avec un niveau de sévérité dit de niveau 1 (voir dans le tableau si bas)… La personne autiste n’a pas pour autant la capacité de filtrer ses sens en sur stimulation. Tous les sens sont ressentis en cacophonie et le niveau d’énergie diminue alors très rapidement. Les gens lui diront souvent qu’elle exagère et de faire un effort, car puisque « son autisme ne se voit pas », elle doit forcément exagérer et se cacher sous des excuses… Elle se sent alors incomprise et a l’impression d’avoir fait tous ces efforts pour rien… Par la suite, avec ce types d’expériences, le temps des fêtes devient donc un anxiogène puissant et avec raison.

Ce qui était souligné dans mon texte précédent, c’était simplement de ne pas minimiser la réalité (qui est parfois invisible) que peuvent vivre certains autistes adultes, en disant qu’ils ne sont pas de « vrais autistes » simplement parce qu’on a l’impression que si ça ne se voit pas, c’est qu’il n’ont forcément pas de défis majeurs dans leur vie quotidienne. Il ne faut certes pas minimiser ou ignorer l’existence de cas de personnes ayant de plus grandes difficultés, sans toutefois nier l’autisme chez ceux chez qui c’est moins apparent et qui semblent avoir moins de troubles dans la vie de tous les jours.

Paya Peste

tableau expliquant la signification des termes « niveau 1, 2 ou 3 » sur les rapports diagnostics

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